COMMENTAIRES SUR LE PHÉNOMÈNE GÉNOCIDAIRE
GÉNOCIDE ET CRIME CONTRE L' HUMANITÉ
Le débat sur le génocide -et sur le crime contre l'humanité ne pouvait s'ouvrir qu'après l'affirmation du principe de la criminalité collective des États, c'est-à-dire de l'État comme sujet d'infraction.
La détermination d'une infraction suppose en effet la codification de sa répression, ce qui introduit la nécessité d'un droit pénal international qui a pour objet la répression des actes illicites qui peuvent être commis par les États dans leurs rapports réciproques.
Or cette détermination de l'infraction -comme celle du délinquant- est incompatible avec la notion de souveraineté de l'État: souverain, l'État n'est pas subordonné, il n'a pas de compte à rendre. Cependant, l'État ne saurait exiger de l'individu le respect de droits que lui, l'État, viole.
Il ne peut ignorer les règles du droit, de la justice et de la morale qu'il impose aux individus. Il ne peut sanctionner un individu pour une infraction unique et s'arroger le droit de commettre la même infraction à une échelle collective. Il y a donc là une contradiction entre le droit interne imposé à l'individu et l'absence de droit contrôlant les actes de l'État qui ne peut être levée que par l'élaboration d'un droit pénal international limitant la souveraineté de l'État.
Ce débat universel a passionné durant des siècles juristes, historiens et philosophes, et il a abouti à la légitimation du droit naturel, c'est-à-dire d'un minimum sans lequel toute légitimité de l'État disparaît.
Source: Yves Ternon L' État criminel. Les génocides au XX e siècle. Éditions du Seuil. 1995.
Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, 9 décembre 1948. Texte intégral
Les Parties contractantes,
Considérant que
l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies par sa
résolution 96 (I) en date du 11 décembre 1946, a déclaré que le
génocide est un crime du droit des gens, en contradiction avec
l'esprit et les fins des Nations Unies et que le monde civilisé
condamne.
Reconnaissant qu'à toutes les périodes de l'histoire le génocide a
infligé de grandes pertes à l'humanité,
Convaincues que pour libérer l'humanité d'un fléau aussi odieux la
coopération internationale est nécessaire,
Conviennent de ce qui suit :
Article premier
Les Parties contractantes confirment que le génocide, qu'il soit
commis en temps de paix ou en temps de guerre, est un crime du droit
des gens, qu'elles s'engagent à prévenir et à punir.
Article II
Dans la présente Convention, le génocide s'entend de l'un quelconque
des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire ou tout ou en
partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :
a) Meurtre de membres du groupe;
b) Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du
groupe ;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence
devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
e) Transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe.
Article III
Seront punis les actes suivants :
a) Le génocide ;
b) L'entente en vue de commettre le génocide ;
c) L'incitation directe et publique à commettre le génocide ;
d) La tentative de génocide ;
e) La complicité dans le génocide.
Article IV
Les personnes ayant commis le génocide ou l'un quelconque des autres
actes énumérés à l'article III seront punies, qu'elles soient des
gouvernants, des fonctionnaires ou des particuliers.
Article V
Les Parties contractantes s'engagent à prendre, conformément à leurs
constitutions respectives, les mesures législatives nécessaires pour
assurer l'application des dispositions de la présente Convention, et
notamment à prévoir des sanctions pénales efficaces frappant les
personnes coupables de génocide ou de l'un quelconque des autres actes
énumérés à l'article III.
Article VI
Les personnes accusées de génocide ou de l'un quelconque des autres
actes énumérés à l'article III seront traduites devant les tribunaux
compétents de l'État sur le territoire duquel l'acte a été commis, ou
devant la cour criminelle internationale qui sera compétente à l'égard
de celles des Parties contractantes qui en auront reconnu la
juridiction.
Article VII
Le génocide et les autres actes énumérés à l'article III ne seront pas
considérés comme des crimes politiques pour ce qui est de
l'extradition
Les Parties contractantes s'engagent en pareil cas à accorder
l'extradition conformément à leur législation et aux traités en
vigueur
Article VIII
Toute Partie contractante peut saisir les organes compétents de
l'Organisation des Nations Unies afin que ceux-ci prennent,
conformément à la Charte des Nations Unies, les mesures qu'ils jugent
appropriées pour la prévention et la répression des actes de génocide
ou de l'un quelconque des autres actes énumérés à l'article III.
Article IX
Les différends entre les Parties contractantes relatifs à l
'interprétation l'application ou l'exécution de la présente Convention
y compris ceux relatifs à la responsabilité d'un État en matière de
génocide ou de l'un quelconque des autres actes énumérés à l'article
III, seront soumis à la Cour internationale de Justice, à la requête
d'une partie au différend.
Article X
La présente Convention, dont les textes anglais, chinois, espagnol
français et russe feront également foi, portera la date du 9 décembre
1948.
Article XI
La présente Convention sera ouverte jusqu'au 31 décembre 1949 à la
signature au nom de tout Membre de l'Organisation des Nations Unies et
de tout État non membre à qui l'Assemblée générale aura adressé une
invitation à cet effet.
La présente Convention sera ratifiée et les instruments de
ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de
l'Organisation des Nations Unies.
A partir du 1er janvier 1950, il pourra être adhéré à la présente
Convention au nom de tout Membre de l'Organisation des Nations Unies
et de tout É0tat non membre qui aura reçu l'invitation susmentionnée
Les instruments d'adhésion seront déposés auprès du Secrétaire général
de l'Organisation des Nations Unies.
Article XII
Toute Partie contractante pourra, à tout moment, par notification
adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies
étendre l'application de la présente Convention à tous les territoires
ou à l'un quelconque des territoires dont elle dirige les relations
extérieures.
Article XIII
Dès le jour où les vingt premiers instruments de ratification ou
d'adhésion auront été déposés, le Secrétaire général en dressera
procès-verbal. Il transmettra copie de ce procès-verbal à tous les
États Membres de l'Organisation des Nations Unies et aux États non
membres visés par l'article XI.
La présente Convention entrera en vigueur le quatre-vingt-dixième jour
qui suivra la date du dépôt du vingtième instrument de ratification ou
d'adhésion.
Toute ratification ou adhésion effectuée ultérieurement à la dernière
date prendra effet le quatre-vingt-dixième jour qui suivra le dépôt de
l'instrument de ratification ou d'adhésion.
Article XIV
La présente Convention aura une durée de dix ans à partir de la date
de son entrée en vigueur.
Elle restera par la suite en vigueur pour une période de cinq ans, et
ainsi de suite, vis-à-vis des Parties contractantes qui ne l'auront
pas dénoncée six mois au moins avant l'expiration du terme
La dénonciation se fera par notification écrite adressée au Secrétaire
général de l'Organisation des Nations Unies.
Article XV
Si, par suite de dénonciations, le nombre des parties à la présente
Convention se trouve ramené à moins de seize, la Convention cessera
d'être en vigueur à partir de la date à laquelle la dernière de ces
dénonciations prendra effet.
Article XVI
Une demande de révision de la présente Convention pourra être formulée
en tout temps par toute Partie contractante, par voie de notification
écrite adressée au Secrétaire général.
L'Assemblée générale statuera sur les mesures à prendre, s'il y a lieu
au sujet de cette demande.
Article XVII
Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies notifiera ce
qui suit à tous les Etats Membres de l'Organisation et aux Etats non
membres visés par l'article XI :
a) Les signatures, ratifications et adhésions reçues en application de
l'article XI :
b) Les notifications reçues en application de l'article XII;
c) La date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur, en
application de l'article XIII;
d) Les dénonciations reçues en application de l'article XIV;
e) L'abrogation de la Convention en application de l'article XV;
f) Les notifications reçues en application de l'article XVI.
Article XVIII
L'original de la présente Convention sera déposé aux archives de
l'Organisation des Nations Unies.
Une copie certifiée conforme sera adressée à tous les États Membres de
l'Organisation des Nations Unies et aux États non membres visés par
l'article XI.
Article XIX
La présente Convention sera enregistrée par le Secrétaire général de
l'Organisation des Nations Unies à la date de son entrée en vigueur
Mise au point de mesures destinées à prévenir et à intervenir pour mettre fin aux génocides par la coopération internationale dans le cadre d'organisations internationales dans le cadre d'organisations internationales compétentes telles que les Nations-Unies.
Résolution adoptée sans vote par la 86e Conférence interparlementaire (Santiago, 12 octobre 1991)
Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
Historique d'une justice pénale internationale
Tribunaux pénaux internationaux: TPIY et TPIR
Les grandes affaires de la justice pénale internationale
Racisme, discrimination raciale, xénophobie et toutes formes de discrimination
Encyclopédie multimédia de la Shoah
Des crimes qui touchent l’ensemble de la communauté internationale
Les juridictions pénales internationales mises en place par les États depuis la seconde guerre mondiale n'ont pas pour but de juger toutes les infractions commises par des individus à l’échelle internationale mais seulement les crimes les plus graves.
Trois
catégories d’infractions internationales ont été définies dans
l’article 6 du statut du Tribunal de Nuremberg : les
crimes contre la paix, les crimes de guerre et les
crimes contre l’humanité.
La future Cour pénale internationale est quant à elle compétente pour
juger les crimes de génocide, les crimes contre
l'humanité, les crimes de guerre et les crimes d’agression,
crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté
internationale, selon l’article 5.1 du statut de Rome.
Les négociateurs du
statut de Rome
ont volontairement limité dans un premier temps le nombre de ces
crimes mais l’article 123.1 ménage la possibilité de modifier la liste
initiale lors d'une conférence de révision qui sera organisée sept ans
après l'entrée en vigueur du statut.
Il faut noter en outre que si les crimes visés sont qualifiés d'internationaux, ce n'est pas tant du fait de leur caractère intrinsèquement international, que parce qu'ils portent atteinte à des valeurs jugées universelles, touchant à la dignité humaine.
CRIME CONTRE LA PAIX ET/OU CRIME D' AGRESSION
Le crime contre la paix est défini dans l’article 6 du Statut du Tribunal de Nuremberg comme la direction, la préparation, le déclenchement ou la poursuite d’une guerre d’agression, ou d’une guerre en violation des traités, assurances ou accords internationaux, ou la participation à un plan concerté ou à un complot pour l’accomplissement de l’un quelconque des actes qui précèdent
Le crime contre la paix, qui n’est pas mentionné dans le statut de Rome, doit être rapproché du crime d'agression, à l'égard duquel la Cour pénale internationale est compétente.
Cependant, lors des négociations du statut de la CPI, les Etats ne sont pas parvenu à s’entendre sur une définition du crime d’agression. Une commission préparatoire a donc été chargée de rédiger un article sur le crime d’agression qui sera adopté plus tard par voie d’amendement (cf. article 5.2). Dans un premier temps, la Cour n’aura donc pas compétence pour le crime d’agression.
La notion de crime de génocide a été pour la première fois explicitée dans un texte à portée internationale à l’issue du procès de Nuremberg. L’acte d’accusation des grands criminels de guerre allemands précisait en effet qu’ils s’étaient livrés .au génocide délibéré et systématique, c’est-à-dire à l’extermination de groupes raciaux et nationaux parmi la population civile de certains territoires occupés, afin de détruire des races ou classes déterminées de populations, et de groupes nationaux, raciaux ou religieux… .
La définition a ensuite été formalisée juridiquement dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948, définition qui a été reprise mot à mot, dans les statuts des Tribunaux pénaux internationaux pour la Yougoslavie et le Rwanda et dans l’article 6 du Statut de Rome.
Dans ces textes, il est précisé que le génocide s’entend de l’un quelconque des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel : meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ; transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe
CRIMES CONTRE L' HUMANITÉ
A la différence du crime de génocide, il n’y a pas, pour les crimes contre l’humanité, de définition généralement admise.
Le Statut du Tribunal de Nuremberg désignait sous ce terme l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout acte inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques raciaux, ou religieux, lorsque ces actes ou persécutions, qu’ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du Tribunal, ou en liaison avec ce crime
Les statuts des Tribunaux pénaux internationaux pour la Yougoslavie et pour le Rwanda reprennent les crimes énoncés par le Statut du Tribunal de Nuremberg mais l’expulsion est substituée à la déportation et sont mentionnés en outre l'emprisonnement, la torture et le viol.
Le Tribunal international est habilité à juger les personnes présumées responsables des crimes suivants lorsqu'ils ont été commis au cours d'un conflit armé, de caractère international ou interne, et dirigés contre une population civile quelle qu'elle soit:(a) Assassinat ; (b) Extermination ; (c) Réduction en esclavage ; (d) Expulsion ; (e) Emprisonnement ; (f) Torture ; (g) Viol ; (h) Persécutions pour des raisons politiques, raciales et religieuses ; (i) Autres actes inhumains (article 5 crimes contre l'humanitédu statut du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie)
Il est important également de noter que le contexte de commission de ces crimes est précisé dans ces différentes définitions et varie pour chacune d’entre elles. Ainsi, le statut du Tribunal de Nuremberg et celui du TPIY lient les crimes contre l’humanité à un contexte de conflit : le premier fait directement référence à la guerre -sous-entendu la seconde guerre mondiale- et à la période qui l’a précédée, tandis que le second précise que le TPIY a compétence pour juger des crimes cités lorsqu’ils ont été commis au cours d’un conflit armé, de caractère international ou interne.. . En revanche, le statut du TPIR ne fait pas référence à un contexte de guerre mais à celui d’une attaque systématique de la population civile.
Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l'humanité l'un quelconque des actes ci-après lorsqu'il est commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque.. (article 7 du Statut de la Cour pénale internationale)
De plus, et c’est là une grande innovation du statut de Rome, la liste des crimes contre l’humanité a été précisée et allongée, notamment pour inclure les disparitions, l’apartheid (qui avait été qualifiée de crime contre l'humanité dans la Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid de 1973) et les crimes sexuels graves autres que le viol.
La liste des crimes contre l'humanité comprend :
meurtre ; extermination ; réduction en esclavage ; déportation ou transfert forcé de population ; emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ; torture ; viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ; persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste (..) ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ; disparitions forcées de personnes ; crimes d’apartheid, autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale (article 7 du Statut de la Cour pénale internationale)
De plus, et c’est là une grande innovation du statut de Rome, la liste des crimes contre l’humanité a été précisée et allongée, notamment pour inclure les disparitions, l’apartheid (qui avait été qualifiée de crime contre l'humanité dans la Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid de 1973) et les crimes sexuels graves autres que le viol.
CRIMES DE GUERRE
Les crimes de guerre ont fait l’objet d’une réglementation plus précoce par le droit international.
Les coutumes et les règles interétatiques visant à limiter les effets néfastes des guerres sont très anciennes.
Au XIXème siècle, Henry Dunant, le fondateur de la Croix Rouge, a été à l’origine de traités réglementant les pratiques de guerre, imposant notamment le principe de protection des militaires blessés (cf. la convention de Genève de 1864). C’est sur ces bases qu’est fondé le droit international humanitaire (ou droit des conflits armés) consacré par la signature des quatre conventions de Genève en 1949. La première convention de Genève pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne reprend le texte, remanié, de la convention de 1864 ; la seconde porte sur l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer, la troisième concerne le traitement des prisonniers de guerre et la quatrième est relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
L’ensemble de ces conventions constitue le droit de Genève qui réglemente la conduite des hostilités lors des conflits internationaux. Elles ont été complétées par deux Protocoles additionnels adoptés en 1977 pour renforcer la protection notamment dans le cadre, cette fois, de conflits armés non internationaux.
Avant la signature des quatre conventions de Genève en 1949, les crimes de guerre avaient également été définis dans le Statut du Tribunal de Nuremberg comme les violations des lois et coutumes de la guerre. Ces violations comprennent, sans y être limitées, l’assassinat, les mauvais traitements et la déportation pour des travaux forcés, ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, l’assassinat ou les mauvais traitements des prisonniers de guerre ou des personnes en mer, l’exécution des otages, le pillage des biens publics ou privés, la destruction sans motif des villes et des villages ou la dévastation que ne justifient pas les exigences militaires
Le statut du TPIY (articles 2 et 3) reprend mot à mot la définition de certains crimes donnée par le statut du Tribunal de Nuremberg, en ajoute d’autres concernant l’emploi d’armes toxiques et les destructions patrimoniales et fait explicitement référence aux Conventions de Genève de 1949.
Le Tribunal international est habilité à poursuivre les personnes qui
commettent ou donnent l'ordre de commettre des infractions graves aux
Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir les actes suivants
dirigés contre des personnes ou des biens protégés aux termes des
dispositions de la Convention de Genève pertinente :
(a) L'homicide intentionnel ;
(b) La torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences
biologiques ;
(c) Le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de
porter des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé ;
(d) La destruction et l'appropriation de biens non justifiées par des
nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon
illicite et arbitraire ;
(e) Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou un civil à
servir dans les forces armées de la puissance ennemie ;
(f) Le fait de priver un prisonnier de guerre ou un civil de son droit
d'être jugé régulièrement et impartialement ;
(g) L'expulsion ou le transfert illégal d'un civil ou sa détention
illégale ;
(h) La prise de civils en otages (article 2 du
Statut du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie)
Le Tribunal international est compétent pour poursuivre les personnes
qui commettent des violations des lois ou coutumes de la guerre. Ces
violations comprennent, sans y être limitées :
(a)L'emploi d'armes toxiques ou d'autres armes conçues pour causer des
souffrances inutiles ;
(b) La destruction sans motif des villes et des villages ou la
dévastation que ne justifient pas les exigences militaires ;
(c) L'attaque ou le bombardement, par quelque moyen que ce soit, de
villes, villages, habitations ou bâtiments non défendus ;
(d) La saisie, la destruction ou l'endommagement délibéré d'édifices
consacrés à la religion, à la bienfaisance et à l'enseignement, aux
arts et aux sciences, à des monuments historiques, à des oeuvres d'art
et à des oeuvres de caractères scientifique ;
(e) Le pillage de biens publics ou privés. (article
3 du Statut du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie)
La définition donnée par le Statut du TPIR (article 4) fait en outre référence au Protocole additionnel II de 1977 relatif à la protection des victimes de conflits armés non internationaux et inclut dans la liste des crimes de guerre les actes de terrorisme mentionnés dans ce protocole.
Le Tribunal international pour le Rwanda est habilité à poursuivre
les personnes qui commettent ou donnent l'ordre de commettre des
violations graves de l'article 3 commun aux Conventions de Genève du
12 août 1949 pour la protection des victimes en temps de guerre, et du
Protocole additionnel II auxdites Conventions du 8 juin 1977. Ces
violations comprennent, sans s'y limiter:
a) Les atteintes portées à la vie, à la santé et au bien-être physique
ou mental des personnes, en particulier le meurtre, de même que les
traitements cruels tels que la torture, les mutilations ou toutes
formes de peines corporelles ;
b) Les punitions collectives ;
c) La prise d'otages ;
d) Les actes de terrorisme ;
e) Les atteintes à la dignité de la personne, notamment le traitements
humiliants et dégradants, le viol, la contrainte à la prostitution et
tout attentat à la pudeur ;
f) Le pillage ;
g) Les condamnations prononcées et les exécutions effectuées sans un
jugement préalable rendu par un tribunal régulièrement constitué,
assorti des garanties judiciaires reconnues comme indispensables par
les peuples civilisés ;
h) La menace de commettre les actes précités (article
4 du Statut du Tribunal pénal international pour le Rwanda)
Les rédacteurs
du statut de la CPI ont également choisi de faire référence aux
conventions de Genève sans mentionner le Protocole II de 1977 sur la
protection des victimes de conflits non internationaux. Cependant, la
liste des crimes de guerre énoncés à l’article 8.2 comprend les crimes
commis en cas de conflit armé ne présentant pas de caractère
international (art. 8.2.c)
Le choix de ne pas s’appuyer sur le texte du Protocole II de 1977 a
été motivé par le fait qu'il n'a pas fait l'objet d'une ratification
quasi-universelle à la différence des Conventions de Genève. Ainsi,
les Etats-Unis, l'Inde, l'Indonésie, Israël, le Japon, la République
démocratique du Congo, le Maroc, la Turquie etc. ne sont pas parties
au Protocole II sur la protection des victimes de conflits non
internationaux.
VERS UNE EXTENSION A D' AUTRES TYPES DE CRIMES ?
Lors des négociations du statut de Rome, plusieurs États avaient demandé une extension de la liste des crimes répréhensibles par la future Cour pénale internationale.
L'Inde, la Turquie voulaient que soit mentionné le terrorisme et des Pays latino-américains et caraïbes le trafic de drogues.
Si ces demandes ont été refusées, le texte final ménage toutefois à l'article 123.1 la possibilité de modifier, sept ans après l'entrée en vigueur du statut, la liste des crimes vis-à-vis desquels la Cour est compétente.
La chambre des représentants de Belgique a d'ores et déjà adopté le 17 juillet 2000 une proposition de résolution étendant la compétence de la Cour pénale internationale à d'autres délits internationaux graves, en particulier les délits économiques
Les nouvelles infractions mentionnées par le texte de la proposition sont :
(a) la
corruption active et passive des fonctionnaires étrangers ;
(b) la prise d'otages internationale ;
(c) le détournement international d'avions et de navires
(d) les infractions graves perpétrées contre l'environnement et ayant
des conséquences transfrontalières ;
(e) le production et le commerce illégaux d'armes ;
(f) le trafic international de stupéfiants ;
(g) le trafic international de titres avec délit d'initié ;
(h) le blanchiment d'argent à l'échelle internationale ;
(i) la fraude transfrontalière ;
(j) la traite d'être humain et d'enfants
Source : La Documentation française